Pr. Isabelle Berry

Académie des arts, lettres et sciences de Languedoc. Fauteuil n° 22.

 

Présentation par M. le Pr. Gui Portal.

Chère Madame Berry, cher professeur, votre arrivée parmi nous, où vous allez occuper le fauteuil 22, va apporter un souffle de jeunesse que notre académie n’avait pas connu depuis fort longtemps.
C’est en effet dans la deuxième moitié du siècle dernier que vous avez vu le jour dans le 8ème arrondissement de Paris, sous le prénom d’Isabelle.
Vous aviez déjà en vous une fibre scientifique naissante puisque votre mère était Docteur es Sciences
C’était donc « écrit dans le ciel » que vous épouseriez un professeur en neurologie et que vous partageriez tous deux la responsabilité d’une famille de trois enfants et les charges de vos professions parallèles.
C’est en décembre  2003, dans cette même salle, lors de la remise de la médaille Marie Curie à l’une de vos élèves, laure Santoro, pour laquelle je vous avais conviée, que je vous ai redécouverte, puisque vous aviez suivi les cours du DEA de Physique radiologique en 1984 à l’Université Paul Sabatier auxquels j’étais convié tous les ans pour quelques cours.
Vous veniez de prendre en 2002 la succession du professeur J.P. Morucci à la direction du Master 2ème année de Radiophysique et d’Imagerie médicales ; ce fut pour moi une très agréable surprise.
Vous avez fait un parcours  universitaire et professionnel prestigieux.
Que chacun en juge sans vouloir donner trop de détails.
Résumons tout d’abord vos études universitaires, depuis vos études de médecine, combinées avec votre maîtrise de Biophysique en 1982, en passant par le Diplôme d’Etudes Approfondies de physique Radiologique, le CES de Radiologie et celui de Médecine nucléaire, le doctorat en médecine et le doctorat de l’Université Paul Sabatier jusqu’à l’Habilitation à diriger des recherches en 1994.
Votre carrière s’est déroulée avec la même passion de la réussite. L’ancienne interne des hôpitaux du CHU de Toulouse en 1982, après avoir assumé la charge de chef de clinique et de maître de conférences,  est aujourd’hui Professeur de Biophysique et médecine nucléaire.
Vous êtes responsable à ce titre :
. du service de médecine nucléaire du CHU Toulouse-Rangueil où travaillent 4 médecins nucléaires, 2 cardiologues et 30 agents hospitaliers;
. d’une unité de radiochirurgie stéréotaxique que vous gérez en collaboration avec le Pr Yves Lazorthes, neurochirurgien;
. du conseil scientifique et de la discipline de Biophysique pour la Faculté de Médecine Toulouse-Rangueil où vous organisez plus de 1000 heures de cours annuels avec une équipe de 11 permanents pour 1500 étudiants en médecine;
. du Master 2ème année de Radiophysique et Imagerie médicales depuis 2002 prenant la suite du Pr Morucci qui recevra durant cette cession, des mains de notre présidente, madame Simone Tauziède et de vous même, le Prix Pasteur;
. de recherches en neuro-imagerie fonctionnelle à l’Unité U455 de l’INSERM.
Vous dispensez également votre enseignement en France et à l’étranger, notamment dans le cadre de la société européenne de Résonance Magnétique Nucléaire dont vous avez été présidente du comité scientifique pour son congrès de 2005.
Vous êtes déjà l’auteur de 114 articles dont 37 ces 5 dernières années dans des revues internationales. 
De 1984 à 1989, vous aviez cumulé 6 distinctions depuis la médaille d’Or de thèse de Diplôme d’Etat de Docteur en Médecine jusqu’au Prix de recherche du Collège des Enseignants de Radiologie de France, puis en 2003, le Prix Torgny Greitz de la société suédoise de Neuroradiologie et en 2006 avez été promue Chevalier dans l’ordre des Palmes Académiques 
Depuis 1990, mettant en lumière votre sens aigu des responsabilités, vous vous êtes impliquée dans des comités et conseils scientifiques nationaux et internationaux parmi lesquels je mentionnerai la vice-présidence que vous assumez actuellement à la « Société Européenne de Résonance Magnétique pour la Médecine et la Biologie » dont vous allez prendre la présidence en 2008. 
Voilà donc, mesdames, messieurs, chers collègues et chers amis, la personnalité que nous allons avoir l’honneur d’adouber au sein de l’Académie des Arts, des lettres et des Sciences de Languedoc.
Je crois que nous pouvons dire tous en cœur « la valeur n’attend pas le nombre des années ».
J’ajouterai que nous comptons beaucoup sur vous et sur le dynamisme de votre jeunesse, cher professeur, pour continuer à nous aider à honorer les sciences au sein de notre académie. 

La Radiochirurgie stéréotaxique
A la croisée de la Neurochirurgie, de la Radiothérapie, de la Radiophysique et de la Biophysique, la Radiochirurgie Stéréotaxique permet d’appliquer le traitement de l’image multimodalité  à une finalité thérapeutique. Ainsi le souhait du Pr Lazorthes, neurochirurgien, de promouvoir à Toulouse un projet de centre régional de radiochirurgie stéréotaxique a immédiatement attiré l’adhésion de tous d’autant que les locaux du service de médecine nucléaire étaient à même de l’accueillir. 
Ainsi aujourd’hui la région est dotée de cette élégante technique thérapeutique alternative d’interventions chirurgicales cérébrales. L’irradiation en dose unique, centrée sur l’image, est délivrée avec une très haute précision. Celle-ci est garantie par l’utilisation d’un cadre stéréotaxique, fixé au crâne du patient dès le début de la procédure. Les repères sont pris en référence à ce cadre avec lequel le scanner est réalisé. L’information de l’IRM et parfois d’autres modalités d’imagerie telle que l’angiographie y sont superposées afin de définir au mieux le volume cible. Le plan d’irradiation est alors préparé selon une stratégie de recoupement isocentrique de faisceaux de rayons X délivrés par un accélérateur linéaire décrivant des arcs autour du patient. Ainsi seule la zone d’entrecroisement des faisceaux recevra une dose de rayonnement significative tandis que les tissus alentours ne seront traversés que par une très faible quantité d’énergie. L’immobilité du patient et la précision de localisation de la cible sont assurées par la fixation à la table de traitement du cadre stéréotaxique toujours maintenu au crâne du patient. Les lésions pouvant être traitées de cette manière ne doivent pas excéder 3 cm de diamètre mais elles sont souvent irrégulières. Ainsi la forme du  faisceau de rayons X les visant de manière dynamique sera à chaque instant et selon chaque projection, ajustée à leur contour par un dispositif appelé collimateur micromultilames. Constitué de lames de plomb de 3 mm d’épaisseur, mobilisées individuellement par un moteur de précision d’horlogerie ce conformateur permet de faire varier la forme du faisceau à partir d’une petite fenêtre de 9 cm de côté. 
A côté du dispositif de contention mécanique par cadre stéréotaxique utilisé pour les traitements de radiochirurgie intracrânienne, des traitements de précision sont en développement sans cadre stéréotaxique. L’accélérateur est alors complété d’une imagerie RX embarquée de type capteur plan et un suivi par dispositif infrarouge de type neuronavigation réajuste en permanence la position du champ d’irradiation sur des repères externes et sur les repères osseux du patient. 
Parmi les pathologies concernées par la radiochirurgie citons en 1er lieu les malformations artério-veineuses cérébrales qui sont une indication fréquente (15 à 20% des indications) car elles se développent souvent dans des zones corticales fonctionnelles ou cérébrales profondes donc peu ou pas accessibles à la chirurgie classique. Elles se manifestent le plus souvent par des hémorragies cérébro-méningées ou des crises comitiales. Leur guérison exige une suppression complète de tous les vaisseaux anormaux. Le plus souvent, la radiochirurgie est proposée en complément d’un autre traitement (chirurgie mais surtout embolisation). Elle peut aussi être réalisée en 1ère intention quand la dimension maximum de son noyau vasculaire central, appelé « nidus » est petit et qu’il ne présente pas de risque de saignement imminent. En effet, l’efficacité de la radiochirurgie est progressive et retardée à un délai de 18 à 24 mois. 
Les tumeurs cérébrales bénignes représentent l’indication majeure estimée entre 35 et 40%. Au 1er rang viennent les neurinomes de l’acoustique qui se manifestent généralement par une surdité homolatérale lentement progressive associée à des vertiges, bourdonnements, … Il est possible grâce à la radiochirurgie de traiter en première intention les neurinomes de petit volume. Cette technique rapporte les meilleurs résultats notamment sur le plan fonctionnel (conservation de l’audition utile, absence de paralysie faciale et de complications post-opératoires).
Les méningiomes, notamment ceux de la base du crâne (sinus caverneux, fosse postérieure, …) sont aussi d’excellentes indications, à condition qu’ils ne se développent pas en contact  de structures à risques comme le sont les voies visuelles. Des stratégies combinées (chirurgie d’exérèse partielle plus radiothérapie, voire radiothérapie fractionnée stéréotaxique) peuvent être alors envisagées.  D’autres tumeurs cérébrales bénignes devenues inopérables peuvent aussi être traitées en deuxième intention et si leur volume le permet qu’il s’agisse de résidus d’adénome hypophysaire, de crâniopharyngiomes, d’épendymomes, de papillomes, d’astrocytomes pilocytiques. 
Les tumeurs cérébrales malignes recouvrant essentiellement les métastases cérébrales et vertébrales représentent environ 30 à 35% d’indications. La radiochirurgie stéréotaxique peut contrôler des métastases réputées radio-résistantes comme celles d’un cancer du rein ou d’un mélanome. Au niveau cérébral, on peut traiter jusqu’à 3 ou 4 métastases dans la même séance. Au niveau vertébral, il s’agit généralement d’une métastase osseuse unique et hyperalgique.
Enfin les indications concernant le domaine de la neurochirurgie fonctionnelle sont en pleine expansion ces dernières années. La 1ère pathologie concernée est la névralgie du trijumeau surtout si elle touche un sujet âgé à risques opératoires après échec confirmé du traitement médical. D’autres indications fonctionnelles sont encore aujourd’hui en évaluation, il s’agit de la chirurgie des mouvements anormaux et de certaines épilepsies pharmaco-résistantes. 
L’activité radio-neurochirurgicale en France s’est implantée en 1992 à Marseille au CHU La Timone sous l’impulsion du Pr Sedan, l’équipe actuelle étant dirigée par les  Pr Jean-Claude Peragut et Jean Régis. En mai 2004, un 2ème système français dédié s’est installé à Lille à l’hôpital Salengro dans le service du Pr Serge Blond, avec Thierry Sarrazin ici présent. Toulouse ouvert en avril 2006 est donc  le 3ème appareillage totalement dédié à la radio-neurochirurgie stéréotaxique basé au quotidien sur la coopération multidisciplinaire de la neurochirurgie, de la radiothérapie, de la neuro-imagerie et de la physique médicale.